Le juge ne peut pas fonder sa décision uniquement ou de manière déterminante sur des déclarations anonymes, au risque de méconnaître l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme.Une société conçoit, fabrique et commercialise des turbines à gaz destinées à la production d’énergie. A compter de l’année 2012, la direction générale de la concurrence, de la consommation, de la répression des fraudes (DGCCRF) a mené dans différentes régions, auprès de plusieurs fournisseurs d’électricité de la société précitée, des enquêtes portant sur les clauses contractuelles, dont l'une est appelée "programme TPS". Celles-ci figurent dans les conditions générales d’achat (CGA), les contrats de fourniture de matériel et les contrats de prestations de services types de la société.Cette dernière a été assignée, à la suite de cette enquête, par le ministre de l’Economie, sur le fondement de l’article L. 442-6 I 2° du code de commerce, dans sa rédaction en vigueur. La cour d’appel de Paris a considéré que la requête du ministère était recevable.Elle a constaté que l’ensemble des témoignages se corroboraient entre eux, en ce qu’ils faisaient état de ce que les fournisseurs et sous-traitants ne pouvaient négocier les clauses litigieuses avec la société. Les juges du fond en ont déduit que ces déclarations confirmaient la crédibilité des procès-verbaux. Ainsi, ils ont estimé que les déclarations des cocontractants établissaient que des fournisseurs de la société étaient dans l’impossibilité juridique, technique et commerciale de travailler avec elle en cas de refus d’adhésion au "programme TPS", comme d’acceptation des CGA. La Cour de cassation, dans un arrêt du 11 mai 2022 (pourvoi n° 19-22.242), casse et annule l’arrêt d’appel, au visa de l’article 6 paragraphes 1 et 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme.Ce texte dispose qu’au regard des exigences du procès équitable, un juge ne peut pas fonder sa décision uniquement ou de manière déterminante sur des déclarations anonymes.En l'espèce, la Haute juridiction judiciaire relève que la cour d’appel s’est fondée de façon déterminante sur des déclarations recueillies anonymement.