Selon la Cour de cassation, lorsqu'une entreprise joue un rôle actif dans le débauchage de salariés d'une société concurrente, entraînant par-là la désorganisation de son service, la première se rend coupable d'acte de concurrence déloyale.Le chef d'équipe du service "catalyseur", son adjoint et onze autres salariés d'une entreprise ont démissionné pour être embauchés aux mêmes conditions/fonctions par une société concurrente. Dénonçant des actes de concurrence déloyale, la société lésée intente une action contre la seconde en réparation de son préjudice. L'arrêt de la cour d'appel condamne cette dernière au paiement d'une provision pour la commission des actes de concurrence déloyale, au préjudice de la société victime. En effet, elle constate que "le débauchage de la moitié de la masse salariale du service catalyseur de la société [lésée] avait eu pour conséquence manifeste de désorganiser le service", constitutive d'une embauche concurrente fautive. La société condamnée se pourvoit en cassation en arguant qu'il s'agissait d'une "simple perturbation inhérente à tout départ de salariés" et que l'entreprise victime avait retrouvé très rapidement ses capacités antérieures. Par un arrêt du 23 juin 2021 (pourvoi n° 19-21.911), la Cour de cassation rejette le pourvoi et considère que le départ de ce personnel (d'ailleurs le plus qualifié de l'entreprise), qui "ne pouvait s'expliquer par des motifs tenant à de mauvaises conditions de travail chez la société victime", avait entraîné la désorganisation du service. En témoignait le rapport d'expertise judiciaire, concluant à "leurs répercussions tant sur l'organisation des chantiers que sur les procédures d'appel d'offres" et établissant "une corrélation avec la perte d'activité et de chiffre d'affaires subie par la société victime". Aussi et surtout, les juges précisent que la société condamnée en appel a joué un rôle actif dans le débauchage des salariés, en les incitant à démissionner, en organisant et facilitant des entretiens avant même de recevoir les candidatures de ces derniers. Voulant être certaine de ne débaucher que les meilleurs salariés, l'entreprise en cause s'est mise en contact avec l'un d'eux pour obtenir des informations sur les qualités de ces derniers. D'après la Cour, ces actes manifestent la "volonté de s'approprier l'essentiel du savoir-faire et de la clientèle de sa concurrente", peu important le fait que les effectifs aient été reconstitués plus tard. En somme, le rôle actif de la société dans le débauchage des salariés de l'entreprises lésée est constitutif d'actes de concurrence déloyale.