La CJUE s’est prononcée sur le cumul des sanctions en matière de droit de la concurrence, ne s’y opposant pas, mais conditionnant sa décision à plusieurs facteurs.Dans deux décisions du 22 mars 2022 (affaires n° C-117/20 et C-151/20), la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) s’est prononcée sur l’application du principe non bis in idem en droit de la concurrence. Dans la première affaire, une société a été sanctionnée par l’autorité de régulation du secteur postal qui a conclu que sa politique de rabais était discriminatoire pour certains clients. En 2016, la cour d'appel de Bruxelles a annulé cette décision dans un arrêt devenu définitif. Cependant, en 2012, l’autorité de la concurrence avait sanctionné la société pour abus de position dominante concernant ce même système de rabais. Cette dernière conteste la décision devant la cour d’appel de Bruxelles pour non-respect du principe non bis in idem. Dans la seconde, deux producteurs allemands de sucre ont été sanctionnés par l’autorité autrichienne de la concurrence pour avoir enfreint le droit de l’Union européenne en matière d’ententes et de droit de la concurrence. Cette sanction reposait sur des entretiens téléphoniques entre les deux sociétés, ceux-ci ayant déjà été consignés par l'autorité allemande de la concurrence dans une décision devenue définitive. Les sociétés ont interjeté appel de cette décision. La CJUE, avant de statuer sur chacune des deux affaires, a commencé par rappeler la double condition du principe non bis in idem : une décision antérieure doit être intervenue et les mêmes faits doivent être visés. Elle précise que ceux-ci s’apprécient par rapport à l’identité des faits matériels, indissociables, qui ont conduit à la décision. Concernant le premier arrêt, la CJUE considère qu’une décision définitive de condamnation pour non-respect d’une règlementation sectorielle n’empêche pas une sanction pour une infraction au droit de la concurrence. Cette décision est toutefois conditionnée à l’existence de règles claires et précises permettant de savoir quels actes peuvent en faire l’objet et de connaitre la coordination entre les deux autorités compétentes. Dans la même logique, la CJUE considère, dans la seconde décision, que le principe non bis in idem ne s’oppose pas à ce qu’une entreprise qui a été sanctionnée pour un comportement ayant eu un effet ou un objet anticoncurrentiel sur le territoire d’un Etat membre, soit condamnée par une autorité de la concurrence d’un autre Etat membre dans une décision définitive. Cependant, tout comme le premier arrêt, il y des limitations qui sont que cette dernière décision ne doit pas reposer sur un objet ou un effet anticoncurrentiel sur le territoire du premier Etat membre.Dans les deux cas, si les conditions n'ont pas été respectées, il y a violation du principe de double incrimination.